lunedì 21 gennaio 2019

Mémoires, pour ne pas oublier...

À Auschwitz   Autre titre : Musée Grévin

Moi si je veux parler c'est afin que la haine
Ait le tambour des sons pour scander ses leçons
Aux confins de Pologne existe une géhenne
Dont le nom siffle et souffle une affreuse chanson

À Auschwitz À Auschwitz Ô syllabes sanglantes
Ici l'on vit ici ici l'on meurt à petit feu
On appelle cela l'exécution lente
Une part de nos coeurs y périt peu à peu

Limites de la fin limites de la force
Ni le Christ n'a tenu ce terrible chemin
Ni cet interminable et déchirant divorce
De l'âme humaine avec l'univers inhumain

Ce sont ici des Olympiques de souffrances
Où l'épouvante bat la mort à tous les coups
Et nous avons ici notre équipe de France
Et nous avons ici cent femmes de chez nous

Puisque je ne pourrais ici tous les redire
Ces cent noms doux aux fils aux frères aux maris
C'est vous que je salue en cette heure la pire
Marie-Claude en disant Je vous salue Marie

Et celle qui partit dans la nuit la première,
Comme à la Liberté monte le premier cri,
Marie-Louise Fleury rendue à la lumière,
Au-delà du tombeau Je vous salue Marie. 

Hélas les terribles semailles
Ensanglantent ce long été
Cela dure trop Ecoutez
On dit que Danielle et que Maï...

Ah! Déferont-ils maille à maille
Notre douce France emportée ?
Ce qu'on dit rend l'ombre plus noire
Sur la misère de nos chants

Les mots sont nuls et peu touchants.
Maï et Danielle Y puis-je croire ?
Comment achever cette histoire
Qui coupe le coeur et le chant

Je vous salue Marie de France aux cents visages
Et celles parmi vous qui portent à jamais
La gloire inexpiable aux assassins d'otages
Seulement de survivre à ceux qu'elles aimaient

Lorsque vous reviendrez car il faut revenir
Il y aura des fleurs tant que vous en voudrez
Il y aura des fleurs couleur de l'avenir
Il y aura des fleurs lorsque vous reviendrez

Vous prendrez votre place où les clartés sont douces
Les enfants baiseront vos mains martyrisées
Et tout à vos pieds las redeviendra de mousse
Musique à votre coeur calme où vous reposer

Haleine des jardins lorsque la nuit va naître
Feuillages de l'été profondeur des prairies
L'hirondelle tantôt qui vint sur la fenêtre
Disait me semble-t-il Je vous salue Marie

Octobre 1943

Louis Aragon

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N.B. REGARDEZ la vidéo en utilisant le lien au dessous de la photo.

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